Rongée par les moisissures, la propriété menaçait de s’effondrer. Il fallut plusieurs années à Carlos Zwick pour s’apercevoir du fabuleux potentiel qu’offrait la bâtisse campée au bord de l’eau.
Lac de Jungfernsee à Potsdam, en Allemagne. Jadis, le charmant rivage proposait aux promeneurs du dimanche un quai, un bistrot, un parc et une salle des fêtes. En été, les bateaux fluviaux transportaient des milliers de touristes. C’est là que sommeillaient deux maisons en piteux état, de surcroît cernées par 4 000 m² de terrain abandonné et d’une route très passante. Délaissé pendant 25 ans, le bien de 712 m2 recevait des visites mais les acquéreurs potentiels s’enfuyaient à la vue des murs imprégnés d’humidité, des poutres menaçant de tomber et des infiltrations d’eau par le toit. Les deux bâtisses configurées en L avaient si triste mine que Carlos Zwick ne leur avait accordé aucun regard en 2011, alors qu’il buvait un café sur une terrasse voisine. L’architecte et son épouse artiste peintre recherchaient une belle demeure, les pieds dans l’eau, au coeur d’une nature luxuriante et proche de la ville. Cet ensemble immobilier se trouvait à des années-lumière de leurs attentes. Trois ans plus tard, une étincelle jaillit : oui, la propriété ressemblait davantage à une friche qu’au manoir de leur rêve mais elle remplissait deux critères essentiels : sa proximité du centre-ville de Potsdam et son prix. « C’était évident qu’il y aurait beaucoup de travail à faire, reconnaît le propriétaire, mais plus je pensais à cette maison, plus j’étais hypnotisé. »
Danse avec les loutres
Les constructions sur le rivage étant soumises à multiples contraintes réglementaires, plusieurs demandes d’autorisations sont déposées avant la validation finale par les autorités. L’abondante végétation empêchait l’intervention d’un camion-grue et c’est à l’aide d’un chariot élévateur à bras télescopique que les travaux ont pu être réalisés. L’ambition de Carlos Zwick. Intégrer l’architecture dans l’environnement et placer le paysage au centre du projet. La première résolution visait à ne pas toucher aux arbres séculaires. En cherchant à rapprocher l’intérieur et l’extérieur le plus possible du lac, le professionnel a imaginé une loggia parée d’un garde-corps vitré s’étendant sur toute la largeur du bâtiment. Aujourd’hui, la maison s’étale sur un vaste étage surélevé et soutenu par des poteaux en acier. C’est là, face au splendide panorama, que le couple et ses six enfants se réunissent et prennent leurs repas. Bien que perchée huit mètres au-dessus du lac, l’habitation donne à la famille l’impression de flotter sur l’eau. « L’endroit procure une qualité de vie indescriptible, explique l’architecte. À l’heure du petit-déjeuner, nous voyons passer des hérons cendrés et des cygnes, et le soir, ce sont les loutres qui se dandinent devant nous. »
Audace
La loi interdit toute modification des terrasses à moins de cinquante mètres de la rive. L’architecte a vu la contrainte comme un défi.
Fondation
La maison repose sur dix piliers droits et quarante poteaux diagonaux qui élèvent la bâtisse à trois mètres du sol.
Respect
Les propriétaires ne souhaitaient pas toucher aux arbres du jardin. C’est ainsi qu’un immense érable se dresse au milieu du salon.
Molosse land
Schröder et Tilda, les deux gentils molosses du couple, disposent eux aussi de leur espace cosy créé sur mesure.
Croisement
C’est ici que s’entrecroisent les deux maisons dont une fournit un logement indépendant pour recevoir la famille. Pour la façade extérieure, le choix s’est porté sur des lames en mélèze étroites et posées à la verticale.
XXe siècle
Des années cinquante à deux mille, le choix des couleurs et le style du mobilier fabriqué sur mesure traverse les décennies.
Vintage
La table en olivier de près de sept mètres de long a été imaginée par Carlos Zwick. Suspensions seventies de Peill & Putzler.
Multicolore
Panachage de couleurs avec les chaises Hay. Au mur, les tableaux de Birgit Borggrebe (à droite) et de Claudia Kensy (à gauche).
Inspiration
L’atelier de Claudia Kensy, la maîtresse de maison et artiste peintre. La verdure alentour se reflète sur ses oeuvres.
Chaleur
Ambiance cocooning au coin du feu. Table basse de Charles Eames et au fond, tableau de Steve MacCurry.
Rétro
Le canapé en velours côtelé Carlton de Bo Concept s’inspire du design des années soixante et soixante-dix. Tableaux de Gerit Koglin.
Discographie
Le meuble abritant les disques 33 tours a été dessiné par Carlos Zwick. Jolie combinaison avec les peintures de Gerit Koglin.
Lamelles
Une chambre aux teintes et matières naturelles. La conception lamellée de la suspension Secto Design 4200 promet de beaux effets de lumière.
Contraste
La monochromie de la salle de bains affiche un harmonieux contraste avec le vert profond de la végétation.
Texte Nathalie Truche
Photos José Campos
Auteur : Claire Pélissier
Date de publication : 26 novembre 2021
Date de la dernière mise à jour : 28 juillet 2022